Coût biologique de la résistance aux antibiotiques: vancomycine-dépendance, le prix ultime bactérien ?

F. Van Bambeke, * P. Courvalin $

* Unité de Pharmacologie Cellulaire et Moléculaire, Université Catholique de Louvain, Bruxelles, Belgique;
$ Unité des Agents Antibactériens, Institut Pasteur, Paris, France

La Lettre de l'Infectiologue (2000) 15:285-294

Depuis quelques années on isole chez des patients traités par les glycopeptides des entérocoques dépendant de la présence de vancomycine pour leur croissance. L'analyse moléculaire du mécanisme responsable de ce phénotype a révélé dans chaque cas une mutation inactivant la D-alanine:D-alanine ligase impliquée dans la synthèse des précurseurs du peptidoglycane. Ces bactéries requièrent donc la présence de vancomycine pour induire l'expression des gènes conférant la résistance aux glycopeptides en permettant la synthèse de précurseurs terminés par D-alanine-D-lactate. Les entérocoques dépendants posent donc de façon critique la question du prix que les bactéries sont prêtes à payer pour s'adapter aux modifications de leur environnement. De manière préoccupante, ces souches, a priori vulnérables en raison de leurs exigences de croissance, sont capables d'acquérir, par mutation supplémentaire, un phénotype de résistance de haut niveau tout en perdant leur caractère dépendant. En effet, ont été obtenus in vitro des révertants ayant recouvré une D-alanine:D-alanine ligase fonctionnelle mais exprimant à un haut niveau les protéines de résistance et des révertants constitutifs synthétisant du D-alanine-D-lactate en l'absence de vancomycine.